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dimanche 30 janvier 2011

Conquête de l'ouest à la française

Après de longues semaines, si ce n’est de longs mois, d’absence journalistique, me voilà back to business sur ce blog pas toujours très actif. C’est que ce retour semble s’imposer, après un périple de trois semaines à travers les Etats-Unis. Car ça y’est, j’ai enfin découvert l’un des intérêts premiers de la troisième année : voyager. Et cette expérience rentre déjà dans la catégorie des souvenirs inoubliables. Je vais tâcher d’en saisir les moments les plus représentatifs afin d’en brosser un portrait synthétique aussi peu rébarbatif que possible.

Donc, après de délicieuses vacances en France, un merveilleux Noël en famille, de chouettes soirées avec les vieux amis, des retrouvailles émouvantes avec Paris (ainsi que tonton, tatie et Chloé chérie), je suis revenue au pays des geeks le 6 janvier. A peine le temps de voir Boston sous la neige et de dire au revoir à la tribu des Mines que je ne reverrai plus avant bien longtemps hélas, puis me voilà dans un nouvel avion pour la découverte du rêve américain et la grande chevauchée aérienne toujours plus à l’ouest.

Chapitre premier : la ville de Rocky. Trois jours à arpenter les rues de Philadelphie en compagnie de Vincent, ex-camarade de classe sciencepiste, et de son charmant coloc anglais. Trois jours plongés au cœur de l’histoire constitutionnelle des USA et surtout, sensibilité de castor oblige (castor = mascotte du MIT), des vestiges du bouillonnement intellectuel qui a secoué la ville lors des révolutions scientifiques du 18ème siècle, encouragées par les ballons à air de Benjamin Franklin et la fascination pour les grands bâtisseurs de l’humanité dont l’épitome serait le déroutant temple maçonnique étonnamment ouvert au public. Instant de grâce au sommet du City Hall, dans le vent glacial de l’hiver nord-américain : bienvenue en Pennsylvanie.



Intermède : expédition aventureuse dans New York, sans portable ni autre moyen de communication, pour prouver au monde entier la précision de mon sens de l’orientation. Et la sympathie des habitants de Brooklyn, en plus de l’efficacité des iphones, sans qui je n’aurai jamais trouvé Céline’s place, ni le fois gras et le boursin accompagnés de vin alsacien qui m’y attendaient.

Chapitre second : retour en France, du moins à deux siècles près. J’en veux terriblement à notre empereur préféré de s’être lancé à corps perdu dans des guerres inefficaces pour la domination de l’Europe, quand cela ne lui a valu que de finir mangé par des baleines à Sainte Hélène, alors qu’il aurait pu garder l’argent du Trésor public et éviter de vendre la bien-aimée Louisianne. New Orleans est une ville effarante, où le temps semble s’écouler plus lentement qu’ailleurs, mais où l’excitation continuelle des rues électrisées par la musique porte vos pas à une cadence effrénée. Il n’y a qu’à se laisser rouler de bars de jazz en bars de jazz, au gré des refoulements (quand on n’a pas 21 ans), des rencontres insolites, de l’odeur des beignets, des maisons coloniales aux colonnes antiques, des galeries d’art et des vieux cable car. Ces quatre nuits, au milieu des hippies, des ploucs australiens, des danseurs de swing et des strip teaseuses coréennes, furent magiques.



Chapitre troisième : Kenza, Céline et moi, satisfaites de la finesse de notre équipe, poursuivons notre périple dans la profondeur du pays. Nous aurions pu nous réfugier dans un hôtel de Memphis pour y rendre hommage à Elvis, mais n’ayant pas raté notre correspondance, notre prochaine étape fut Denver, Colorado. L’accueil du climat, visiblement mécontent de notre arrivée, fut aussi froid que celui de nos adorables compagnons parisiens expatriés fut chaleureux. Ce séjour fut surtout l’occasion de faire enfin l’expérience d’un véritable campus américain. Car c’est un fait : le MIT n’en est pas un. Il faut avoir marché dans Boulder, croisé des mecs en shorts/tongs par des températures négatives, tenu des conversations de trois phrases (toutes identiques) avec des undergrad identiquement stupides, et surtout bu de la bière ultra légère à même le fût dans une frat party autenthique (sans oublier de voler leurs cups en plastique et d’enflammer la piste de danse sur Moi Lolita avant de se faire chasser par des propriétaires en colère), pour enfin comprendre ce qu’est la vie de l’étudiant américain moyen: une série télé de mauvaise qualité réunissant l’ensemble des clichés, ni plus ni moins. Heureusement, la rencontre plus élaborée avec quelques grad students permet de nuancer ce désolant constat, et de dresser une conclusion plus optimiste : les enfants d’Uncle Sam mettent juste un plus de temps à développer leur maturité que leurs homologues européens.



Chapitre quatrième : après ces quelques jours de folle distraction, de fête endiablée et de randonnée dans la montagne (euh… en fait de sieste sur le canapé), je dus quitter mes deux adorables compères dans de déchirants adieux pour m’envoler une dernière fois, direction la ville des brumes tièdes où l’on porte des fleurs dans ses cheveux et où il fait meilleur en janvier qu’en juillet. Grâce à l’hospitalité sans égale d’Emily chérie et de sa super family, j’y ai passé une ultime semaine de vacances comme je n’aurais pu en rêver. Entre des séances shopping très fructueuses, des visites guidées dignes des meilleurs circuits touristiques, des traversées de la campagne californienne à vous laisser muet d’émerveillement, de délicieuses promenades avec notre Richard préféré dans Berkeley, Mission District, Castro et j’en passe, ainsi que des repas en famille au doux parfum français, mon lointain souvenir de San Francisco fut ranimé dans toute son intensité.



Epilogue : c’est au siège 19B d’un vol Virgin America SF/Boston que s’achève ce chouette voyage, et comme pour boucler la boucle, mon voisin m’a salué d’un « Hello, beaver » en voyant mon inséparable sweet MIT, puis m’a expliqué qu’il préférait largement la Californie au froid de Cambridge et Harvard dont il est diplômé, qu’il adorait la France pour y avoir passer sa lune de miel, et qu’il rendait visite à son fils, postdoc en neurosciences dans mon université adorée, avant que celui-ci ne déménage à Boulder. Le monde est bien petit.

Et me voilà résolue à retrouver la neige, ma vue sur la Charles River, et surtout, les cours. Ces trois semaines n’auront pas seulement éclairé ma connaissance du territoire américain et révélé son incroyable diversité, elles m’auront aussi rappelé à quel point je suis intrinsèquement et irrémédiablement, dans la profondeur de toutes mes fibres sensibles, une SciencesPo, une vraie. Apprendre le « comment », c’est bien, mais réfléchir au « pourquoi », c’est encore mieux. Donc bye bye multivariable calculus, je change mes plans du second semestre et opte pour de la philosophie de la mécanique quantique. Et je commence à affiner sérieusement mes projets d’avenir en croisant les doigts aussi forts que faire se peut pour que les génies de Polytechnique réalisent à quel point Richard et moi sommes des leaders naturels indispensables à la marche de l’avenir.